Le
sujet du livre est l'opération montée par Pajol, un
jeune banquier qui
veut punir ses anciens employeurs
qui l'ont trahi et faire sauter le
système financier mondial qu'il
juge criminel.
La mécanique romanesque du livre
est l'enquête que mène Florence, une jeune
journaliste qui ne connaît pratiquement
rien du monde de la finance et qui
veut comprendre pourquoi son
ami d'enfance a disparu.
Le rôle capital de Florence dans
le roman est qu'en découvrant, au fil de
son enquête, les pratiques extravagantes
de la finance internationale, elle
les révèle aux lecteurs. L'astuce
du système est qu'en enquêtant, elle
perturbe les plans de Pajol.
A chaque chapitre, correspond
une avancée de l'enquête et un
éclairage pédagogique des règles
et des pratiques financières
internationales.
Prologue
Le lourd Dao des contrebandiers
pakistanais avançait à petite allure en direction de
Kobar, la dernière crique à l’ouest du détroit d’Ormuz,
là ou les fonds s’enfoncent à plus de mille mètres sous
les falaises.
Zaïre, le vieux brigand, connaissait
chaque anfractuosité de la roche aride contre laquelle
il colla son bateau pour échapper aux regards. Si ses
renseignements étaient exacts, le catamaran du français
serait là dans moins d’une heure. Il sourit à l’idée
du piège qui se refermait implacablement sur l’imprudent
qui dans cet étroit passage allait venir frôler la falaise,
à l’endroit précis où Zaïre venait d’accoster. Avant
minuit, il attaquerait sa proie et livrerait le chargement
à ses marins qu’ils payaient au butin. Le commandant
du sous-marin de type Han 402 qui suivait le Dao depuis
qu’il avait quitté les eaux internationales déclencha
son sonar pour ne pas perdre sa cible à un moment qui
pouvait devenir intéressant.
Dans la salle des opérations
du sous-marin nucléaire américain qui patrouillait dans
le coin, le lieutenant qui venait de prendre son quart
suivit la progression du Han 402 en se demandant ce
que faisait là ce bâtiment de guerre chinois. Il ne
s’en préoccupa pas outre mesure. A n’importe quelle
heure du jour et de la nuit, des bateaux de toute nature
et de tous pays barbotent dans ces eaux stratégiques
qui séparent les émirats arabes du sultanat d’Oman.
80% de l’approvisionnement en pétrole de tout le monde
asiatique transitent par ce détroit.
A la sortie du chenal, une frégate
furtive de la marine française guettait sans impatience
l’apparition du catamaran que le chef de mission avait
ordre de récupérer - par la force s’il le fallait -
dès qu’il pénétrerait dans les eaux internationales.
A la barre de son catamaran de
55 pieds, le Français en question filait sous le vent,
toutes voiles dehors. Il barrait droit sur la bouée
12 du chenal obligatoire qu’il fallait emprunter pour
franchir le détroit. La nuit était sublime, le vent,
comme une caresse, mariait les odeurs de la mer et les
parfums de sable qui montaient du désert. Détaché de
toute autre contingence, oubliant l’horreur d’un monde
auquel il savait bien qu’il n’échapperait pas, Eric
Pajol, marin par vocation mais banquier pour son malheur,
jouissait comme un enfant du plaisir de faire courir
sur la vague ce bateau de rêve.
CHAPITRE 1
Arcachon
: La menace
Pendant toute la durée de l’entretien,
les deux hommes se sont tenus côte à côte sur le canapé
du salon, détendus et affables, posant de temps à autre
sur leur hôtesse leur regard de loup. Diane Pajol ne
comprenait pas ce que ces hommes lui voulaient et elle
souhaitait qu’ils s’en aillent mais elle était trop
bien élevée pour exprimer une opinion aussi tranchée.
Quand ils avaient sonné à la
porte de la villa, ils s’étaient présentés comme des
amis de son mari. Elle avait demandé avec soulagement
:
- On l’a retrouvé ?
- Pouvons-nous entrer ? avait
demandé poliment le plus petit qui avait dit s’appeler
Chatrier.
Ils étaient habillés avec le
même soin. Ils étaient bronzés comme des gens qui vivent
en plein air. « Des marins » avait-elle pensé. Elle
les avait laissés entrer, bien sûr car Diane Pajol n’avait
pas été préparée à refuser sa porte à des gens si bien
habillés. Elle les avait précédés jusqu’au salon, les
avait invités à s’asseoir et leur avait proposés des
rafraîchissements qu’ils avaient refusés. Elle avait
avancé un cendrier quand ils avaient sorti leurs cigarettes.
Puis elle avait croisé pudiquement sous son fauteuil
ses jambes magnifiques qui ne manquaient jamais d’attirer
le regard des hommes. Elle avait tiré sa jupe sur ses
genoux et reposé ses mains sur son giron. Elle avait
attendu qu’ils parlent en se demandant à quel moment
elle ne pourrait plus retenir le hurlement de terreur
qui lui nouait le ventre.
- Vous êtes des amis de Eric
? avait-elle trouver la force de demander.
- En effet, avait répondu Chatrier,
en souriant. Nous sommes en affaires.
- Vous le connaissiez depuis
longtemps ? demanda-t-elle encore, sidérée de s’entendre
parler de son mari à l’imparfait, comme s’il était déjà
mort.
- Depuis quelques mois. Savez-vous
où nous pouvons le trouver ?
Sidérée, elle l’avait dévisagé
sans comprendre.
- Vous ne savez pas ?… Vous ne
savez pas ?… Il a disparu.
|